Chapitre 3

 

 

Je repoussai de mon visage les longs cheveux de mes Ténèbres qui me masquaient la vue, tandis que s’ajoutait aux cris et hurlements tout un fracas rappelant une bourrasque se ruant vers nous et du verre qui se brise. J’entendis Mamie hurler. Je repoussai alors Doyle, en proie au désespoir. Qu’est-ce qui était en train de lui arriver ?!

— Doyle, dis-moi ce qui se passe !

Autant essayer d’ébranler un mur. Rien n’aurait pu le faire bouger à moins qu’il ne se laisse faire. J’avais survécu jusqu’ici tout en n’étant pas aussi forte que ceux de mon escorte mais, en cet instant, cela me fit comprendre que, si je pouvais devenir leur Reine, je ne serais jamais leur égale, pas à ce niveau-là.

Je parvins enfin à me dépatouiller de cette ample chevelure pour apercevoir le plafond. Ayant tourné la tête, je remarquai Galen près de la porte, qui protégeait la doctoresse de son corps, des bris de verre et des éclats de bois éparpillés tout autour de lui. Les deux flics en uniforme en faction dans le couloir avaient surgi dans la chambre, revolver au poing. Mais ce furent leurs visages expressifs qui me fournirent quelques indices de ce qui avait bien pu se passer à l’autre bout de la pièce.

L’horreur, une horreur diffuse, stupéfiante, s’y reflétait ! Ayant levé leurs flingues, ils visèrent, comme si leur cible, quelle qu’elle soit, bougeait un peu trop… et qu’elle était plus importante que quoi que ce soit dans la chambre dont j’eus conscience car ils braquaient leurs armes bien au-dessus du plus grand de mes hommes !

Les coups de feu retentirent bruyamment dans cet espace restreint. Durant quelques instants, j’en fus assourdie, puis abasourdie en voyant la créature sur laquelle ils tiraient. De gigantesques tentacules tentaient de les saisir. Des formes noires plus petites volaient vers eux à toute allure, ressemblant vaguement à des chauves-souris, si celles-ci pouvaient être de la taille d’un individu de petit gabarit et ceinturées de tentacules qui se tortillaient en tous sens.

Un cri retentit de l’autre côté de la fenêtre tandis que ces membres flexibles – certains aussi épais que la taille d’un homme –, poursuivaient leur offensive, même sous le feu de ces balles en plomb capables de blesser les êtres de la Féerie. J’avais déjà eu affaire à eux, et à moins de les trancher net, on ne pouvait les arrêter.

Ils frappèrent de plein fouet les deux policiers, les projetant si violemment contre le mur que toute la chambre en fut ébranlée, tandis que de plus petits les désarmaient, ce qui me convenait parfaitement, d’ailleurs, car comment expliquer à la police que ce cauchemar tentaculaire était de notre côté ? Les humains avaient une certaine tendance à considérer que le bien était généralement incarné par la beauté, alors que le mal ne peut qu’être partisan de la laideur. Moi, j’avais remarqué que c’était l’inverse qui se vérifiait le plus souvent.

Les Volants de la Nuit, telles de sombres raies Manta aériennes, descendaient en piqué. Ils pouvaient se tenir sur leurs pieds, mais leurs membres principaux étaient ces tentacules situés à mi-corps qui se saisissaient à présent des revolvers que retenaient les plus gros. J’en observais un à proximité de nous, s’accrochant au mur de ses ventouses, qui s’aidait d’un tentacule plus petit pour enclencher le cran de sûreté du flingue. Les Volants de la Nuit étaient dotés d’une grande dextérité, contrairement à cette bête plus volumineuse.

Je sentis Doyle bouger, toujours sur moi.

— Rhys, as-tu conjuré ce sortilège ? demanda-t-il en tournant la tête vers lui.

— Oui.

Il dirigea ensuite son attention vers les policiers et la doctoresse toujours recroquevillée sous la supervision protectrice de Galen, avant de se redresser lentement. Je pouvais sentir la tension dans tous ses muscles, prêt à réagir en cas de danger. Il se remit finalement debout à côté du lit, ses épaules et ses bras puissants si tendus que cela n’aurait pu m’échapper.

Rhys et Sholto retenaient Mamie entre eux. Et comme cela était difficile ! Un Farfadet était capable en une nuit de moissonner un champ à lui tout seul ou de battre tout le blé stocké dans une grange. Leurs facultés magiques ne se limitaient pas à la télékinésie ; ils possédaient également une force physique incroyable, brutale.

Je savais qu’elle devait leur donner du fil à retordre, car Sholto avait dû trouver un complément malgré ses deux mains puissantes pour la maintenir. Son père avait été un Volant de la Nuit, comme ces créatures ressemblant à des raies Manta qui avaient désarmé les flics. Des tentacules identiques venaient tout juste de surgir de sous le tee-shirt qu’il avait enfilé pour paraître humain, aussi blancs que sa peau, parcourus de veinules d’or et de la couleur des joyaux. Magnifiques, pour tout dire, lorsqu’on parvenait à accepter qu’ils existent.

Mamie n’avait pas eu ce loisir et abreuvait Sholto d’un chapelet d’injures.

— Me touche pas avec ces trucs malpropres !

Ses bras avaient beau être aussi fins que des allumettes, lorsqu’elle tenta de se dégager Rhys comme Sholto furent déstabilisés.

Sholto s’ancra alors au sol de deux de ses plus épais tentacules, et à la prochaine tentative de Mamie pour se libérer Rhys fut le seul à vaciller. Sholto avait établi ses appuis et pouvait la retenir grâce à ses excroissances supplémentaires, qui n’étaient pas seulement là pour faire horreur ou joli. Il s’agissait de membres à part entière qui, en tant que tels, avaient leur utilité.

Rhys cria pour se faire entendre au-dessus des cris que poussaient Mamie, les policiers et tous les autres :

— Hettie, quelqu’un t’a ensorcelée !

Il prit le risque de lâcher son poignet osseux. J’aperçus entre son pouce et son index quelque chose de doré avant que Mamie ne réussisse soudainement à se libérer complètement de son emprise. Retenir un Farfadet était pour la plupart un boulot à accomplir à deux, même pour des guerriers Sidhes. Particulièrement, si on ne voulait pas le blesser.

Mamie leva le poing, et je crois bien qu’elle le lui aurait flanqué en pleine figure si Sholto ne lui avait attrapé le bras d’un tentacule, l’arrêtant juste avant qu’elle n’assène son uppercut.

Elle se mit à hurler plus fort, poussant des cris stridents, et entreprit de se défendre vaillamment. De petits objets commencèrent à voler dans sa direction, venant de toute la chambre. Ce ne fut que lorsque les bris de la fenêtre s’y joignirent que Rhys lui ficha une baffe.

Je crois que nous en fûmes tous estomaqués, parce que Mamie le regarda, sidérée. Il l’appela par son prénom, d’une voix forte, audible, imprégnée de pouvoir. Elle résonna dans la chambre d’un tel écho qu’on eût cru une cloche gigantesque, comme n’aurait jamais pu le faire parole humaine.

Il lui présenta sous le nez le fil doré.

— Quelqu’un a mêlé ça à tes cheveux, Hettie. Il s’agit d’un Sortilège d’Émotivité destiné à exacerber tous les sentiments que tu éprouves, intensifiant ta colère, ta haine, tes préjugés à l’encontre de la sombre Cour. Tu es l’une des Feys les plus raisonnables que je connaisse, Hettie. Pourquoi aurais-tu choisi aujourd’hui pour perdre tout contrôle ?

Il éloigna le filament brillant, qu’elle suivit des yeux, l’obligeant ainsi à tourner son regard fixe vers moi, sur le lit.

— Pourquoi mettre en danger ta petite-fille et tes arrière-petits-enfants ? Cela ne te ressemble pas, Hettie.

Ses yeux, où des larmes commençaient à scintiller, se portèrent au-delà du fil d’or pour se poser sur moi.

— J’suis désolée, Merry. D’autant plus que j’sais qui c’est qui m’a méchamment emmelinée !

Un bruit nous parvint du côté de la porte.

— Sholto, tes tentacules écrabouillent les policiers, l’avertit Galen.

Sholto tourna son attention vers le mur du fond et son chargement de flics « ligotés ». Il semblait avoir oublié qu’il les retenait.

— Si je les relâche, ils vont vouloir jouer aux héros, car ils ne croiront jamais que nous ne sommes pas les méchants. Nous y ressemblons beaucoup trop pour être convaincants aux yeux des humains, dit-il avec amertume.

Comment allions-nous expliquer ce qui venait de se passer pour que les policiers n’en tirent justement pas ce type de conclusions ? Comment leur expliquer que ces tentacules de poulpe géant s’étaient portés à notre secours, et que cette petite grand-mère semblant inoffensive représentait en fait le danger auquel nous nous étions retrouvés confrontés ?

— Tu dois rappeler ta bête, Sholto, lui dit Doyle.

— Ils risquent de filer pour aller chercher du renfort, ou de dégainer un autre flingue pour tuer mon monstre. Ils l’ont déjà blessé avec leurs balles en plomb.

Cette créature – avec des tentacules plus gros que moi – était donc de sexe masculin ! Marrant, ça, même en grandissant avec un Volant de la Nuit comme garde du corps, je n’aurais pas pensé à décrire cet être géantissime aux membres tentaculaires par « lui » ou « elle ». Pour moi, il s’agissait plutôt de « ce truc-là ». Mais pas du tout ! Apparemment, il s’agissait d’un « lui », ce qui impliquait qu’il devait se trouver quelque part une « elle ». J’avais supposé que c’était le même genre de créature qui avait accompagné Sholto lorsqu’il était venu me chercher à Los Angeles, mais il se pouvait qu’il se soit agi de la fille ? Ou peut-être étais-je encore sous le choc, ne parvenant pas à me figurer que ce que je regardais pouvait l’être, en fait.

— Je suis désolé que votre bête ait été blessée, alors que tout ce que vous faisiez était de tenter de protéger la Princesse.

Doyle s’avança vers les policiers retenus en suspension, tout en restant prudemment hors de portée de ces membres qui se contorsionnaient.

— Officiers, veuillez accepter mes excuses. Il y a eu un léger malentendu. Les tentacules qui vous retiennent sont venus au secours de la Princesse, et non pour la blesser. Lorsque cette créature a vu que vous étiez armés, elle a présumé que vous vous apprêtiez à nuire à la Princesse Meredith, tout comme vous l’auriez présumé si des étrangers s’étaient rués ici revolver au poing.

Le flic et son collègue échangèrent un regard. Il était difficile de décrypter leurs visages marbrés d’avoir été retenus trop longtemps par les tentacules, mais cela s’apparentait presque à : « Tu y crois, toi ? »

Celui qui était un peu plus âgé parvint à dire :

— Vous nous dites que ce… truc est de votre côté ?

— En effet, répondit Doyle.

— Messieurs, dis-je du lit, c’est comme si vous aviez surgi dans ma chambre en vous mettant à tirer sur mon chien parce qu’il vous avait fichu la trouille.

— Ma Dame, Princesse, ce n’est pas un chien, répliqua le policier senior tout en essayant d’écarter les tentacules qui le serraient à la gorge.

— D’ailleurs, les chiens sont interdits dans un hôpital, ajoutai-je.

Le Docteur Mason prit alors la parole, toujours recroquevillée par terre derrière Galen.

— Si nous vous autorisons vos chiens, cette « chose » reviendra-t-elle dans ce bâtiment ?

Doyle fit un signe de tête à l’intention de Galen, ce qui suffit pour qu’il aide le docteur à se remettre debout. Elle ne quittait pas de ses yeux écarquillés les gigantesques tentacules qui « ligotaient » toujours les policiers. Ou était-ce plutôt les Volants de la Nuit accrochés au plafond juste au-dessus d’eux ? Avec autant de détails intéressants, il était en effet difficile de savoir où donner de la tête.

— Je vais ordonner à mes sujets de rester dehors à la fenêtre de la Princesse, dit Sholto, jusqu’à ce que nous soyons sûrs que tout danger soit écarté.

— Donc, ça, ces machins-là, étaient de l’autre côté de la vitre durant tout ce temps ? demanda la doctoresse d’une voix quelque peu tremblotante.

— Oui, répondit Sholto.

— Qu’est-ce qui pourrait m’attaquer avec ces gardes ? demandai-je, y intégrant tous les Feys présents dans la chambre, ou tout du moins ceux qu’elle désirerait y inclure.

— Personne ne nous avait dit que vous aviez… dit le flic ayant de la bouteille avant de s’interrompre, cherchant ses mots, sans y parvenir.

— Des inhumanoïdes, l’aida son collègue en sourcillant à ce terme, comme s’il ne sonnait pas vraiment juste, même à ses oreilles, sans néanmoins tenter d’en trouver un autre.

Après tout, ce n’était pas un si mauvais choix, et étrangement approprié.

— Nous ne sommes pas dans l’obligation d’informer la police humaine de toutes nos mesures préventives concernant la sécurité de la Princesse Meredith, dit Doyle.

— Étant postés à la porte, nous aurions dû avoir une liste des créatures qui sont de votre côté, observa le flic plus âgé.

Bonne remarque, qui prouvait qu’il récupérait plutôt vite après avoir été attaqué par des tentacules géants sans corps et des cauchemars volants. Un dur à cuire, ou tout simplement un flic. On ne dure pas très longtemps dans cette profession sans avoir les épaules solides. Il donnait l’impression d’avoir dépassé l’étape critique des dix ans. Un coriace. Son jeune collègue n’arrêtait pas de jeter des coups d’œil nerveux aux Volants de la Nuit accrochés au plafond. Il semblait cependant reprendre courage face à l’attitude blasée de son coéquipier. J’avais pu l’observer auparavant, en collaborant avec la police sur certaines enquêtes lorsque je travaillais pour l’Agence de Détectives Grey. Les plus vieux apaisaient les plus jeunes, si leur association fonctionnait.

— Pourrions-nous récupérer nos revolvers ? demanda le jeunot.

Le plus ancien lui lança un regard disant sans aucune ambiguïté que ce n’était vraiment pas le moment de poser la question. Tous deux devaient porter au moins un flingue en réserve planqué quelque part, ou du moins, le plus vieux. La réglementation peut bien raconter ce qu’elle veut, mais je ne connaissais pas beaucoup d’officiers de police qui n’en aient qu’un. Leur vie dépend bien trop souvent du fait d’être équipé d’un arsenal conséquent.

— Si vous promettez de ne pas tirer, sur aucun de notre peuple, d’accord, consentit Doyle.

— Comment va la femme ? s’enquit le flic chevronné en indiquant de la tête Mamie, toujours retenue par les excroissances et les bras de Sholto.

Mais j’étais quasi certaine qu’aucun des agents ne regardait ses membres humains. J’aurais pu parier presque n’importe quoi que si on leur demandait de le décrire plus tard, ils ne parleraient que des tentacules. Les flics sont entraînés à observer, mais certaines choses retiennent trop l’attention, même pour ces gars portant insigne.

— Ça ira pour elle. Ce n’est qu’un petit sortilège, dit Rhys en s’avançant vers nous, avec aux lèvres ce sourire d’une familiarité excessive.

Je remarquai qu’il usait en ce moment même de glamour pour dissimuler qu’il était borgne. Pour le moment, il voulait paraître tout à fait inoffensif. Les balafres semblent inciter les gens à penser qu’on a dû les mériter.

— Qu’est-ce que cela signifie ? s’enquit le flic vétéran.

Il n’allait pas nous lâcher, là avec son collègue, cernés de ce qu’il pensait être des visions de cauchemar qui leur avaient piqué leurs flingues. Et il aurait fallu n’être pas très futé pour ne pas remarquer la force physique de Doyle et des autres hommes présents dans la chambre, sans mentionner ces petits extras qu’exhibait Sholto. Le policier était loin d’être idiot, mais il percevait également Mamie comme une vieille dame vulnérable. Il n’allait pas partir avant de s’être assuré qu’elle soit saine et sauve. Je me fis une idée de la manière dont il avait réussi à survivre dans ce boulot depuis plus d’une décennie, voire pourquoi il n’avait jamais quitté l’uniforme. Si j’avais été à sa place, j’aurais filé pour aller chercher du renfort. Mais j’étais une femme, ce qui vous rend plus prudente face à la violence.

— Grand-Mère, l’appelai-je.

Et cela fut peut-être l’une des rares occasions où j’employais cette dénomination dans sa totalité. Généralement, elle était Mamie pour moi. Mais ce soir, je voulais bien faire comprendre aux policiers que nous étions liées par le sang.

Elle me regarda, de la douleur dans les yeux.

— Oh, Merry ! Mon enfant ! M’appelle pas comme ça !

— Que tu n’approuves pas mon choix d’hommes ne te donne pas le droit de dévaster ma chambre d’hôpital avec tes talents télékinésiques, Mamie.

— J’étais envoûtée, comme tu l’sais.

— Ah vraiment ? dis-je, la voix glaciale, loin d’être convaincue. Ce sortilège a été conçu pour décupler l’intensité de tes véritables sentiments, Mamie. Tu hais vraiment Sholto, ainsi que Doyle, les pères de mes enfants. Cela ne changera pas.

— Voulez-vous dire que c’est cette vieil… femme qui a fait léviter tout ça en les projetant sur tout le monde ? s’étonna le flic plus âgé, dubitatif.

Mamie tenta de se dégager de la poigne de Sholto.

— Je suis d’nouveau moi-même, Seigneur des Ombres. Tu peux m’lâcher !

— Jure. Jure sur Les Ténèbres Qui Dévorent Toutes Choses que tu ne tenteras pas de me blesser ni personne d’autre dans cette pièce, lui dit-il.

— Je jure de n’blesser personne dans c’te pièce, pour l’moment, mais je n’promets rien d’aut’, parce que t’es l’meurtrier d’ma mère !

— Le meurtrier ! s’étonna le vétéran.

— Il a tué sa mère, mon arrière-grand-mère, il y a de cela cinq cents ans environ, ou me tromperai-je d’un siècle ou deux ? demandai-je.

— De deux cents ans, répondit Rhys.

Il se tenait devant les deux agents, tout sourires, plaisant, alors que ses talents magiques n’avaient strictement rien à voir avec cette expression réjouie. Cependant, il y en avait un dans la chambre qui, dans ce domaine, en avait à revendre.

— Pourquoi ne vas-tu pas parler aux gentils policiers, Galen ? lui suggéra Rhys.

Galen, quelque peu interloqué, franchit la courte distance qui le séparait des flics. Si se retrouver directement en dessous d’une multitude de Volants de la Nuit l’inquiétait, il n’en laissa rien paraître. Ce qui signifiait qu’il n’en avait rien à faire, parce qu’il était incapable de dissimuler aussi bien ce qu’il ressentait.

— Je suis désolé que vous ayez été témoins de cette confusion, dit-il amicalement, semblant empli de bon sens.

L’une de ses capacités était d’être sincèrement affable, ce qu’on n’interpréterait pas généralement comme une faculté magique en soi. Mais charmer son monde n’est pas une mince affaire. J’avais pu remarquer comme cela fonctionnait super-bien sur les humains, et à un certain degré, sur les Sidhes et les Feys inférieurs. Galen avait toujours eu un soupçon de ce « je-ne-sais-quoi », une sorte de glamour, mais depuis que tous nos pouvoirs s’étaient retrouvés boostés, sa « gentillesse » innée s’était développée jusqu’à devenir un véritable don d’enchantement.

À leur visage, je vis que les policiers se détendaient, le plus jeune arborant un sourire qui se propagea jusqu’à ses yeux. Je ne parvenais pas à entendre ce que leur disait Galen, mais cela n’avait aucune importance. Il avait saisi ce que Rhys attendait de lui. Grâce au charme envoûtant de Galen qui nous facilitait ainsi la tâche, nous pûmes leur rendre leurs revolvers, puis ils s’en allèrent, enchantés, les Volants de la Nuit toujours suspendus au plafond comme des chauves-souris, les tentacules qui se tortillaient encore à la fenêtre produisant un effet de 3D particulièrement réussi. Lorsque Sholto avait lâché Mamie, le flic plus âgé avait totalement succombé au charme de Galen. Je pense que s’il avait persisté à croire que tout le monde était en danger, il aurait été beaucoup plus délicat de le persuader du contraire.

Oh ! Et Sholto avait rangé ses tentacules ! Autrefois, il les aurait dissimulés par le glamour, mais ils n’en auraient pas moins été là. Il avait réussi à les planquer, même aux caresses d’une main sur la poitrine et le ventre, qui donnaient alors la sensation d’être parfaitement lisses. Un puissant glamour ! Mais lorsque la magie sauvage s’était échappée, ou plutôt s’était réactivée par son entremise et la mienne, il avait acquis un nouveau talent : ses tentacules prenaient à l’occasion l’apparence d’un tatouage hyperréaliste, et c’était bien un tatouage, qui d’une pensée pouvait retrouver sa tridimensionnalité. Similaire à ceux que Galen et moi arborions, respectivement un papillon de jour et de nuit. Comme j’étais reconnaissante qu’ils aient cessé de battre des ailes, bien vivants mais piégés sous notre peau ! Une sensation loin d’être agréable !

Plusieurs de mes hommes avaient reçu un tatouage, dont certains pouvaient se faire réels, telles par exemple de véritables plantes grimpantes qui s’entortillaient sur leur corps. Mais aucun n’était aussi concret que le dessin sur Sholto, bien qu’il fût le seul ayant été une part réelle de sa physionomie.

La personnalité engageante de Galen n’avait aucun impact si la personne en face de lui était terrorisée, ou avait les yeux fixés sur quelque chose d’effrayant, si bien que Sholto avait discrètement transformé ses petits extras en un tatouage des plus délicats. La magie de Galen était moyenne selon nos normes, mais particulièrement utile dans certaines situations où se retrouvaient impuissants des pouvoirs bien plus impressionnants.

À la suggestion de Rhys, il se tourna ensuite vers la doctoresse, et cela fonctionna d’autant mieux sur elle. Mais il est vrai qu’elle était femme et qu’il était d’un charme… ! Elle irait sans doute ensuite rendre visite à un ou deux patients, avant de réaliser finalement qu’elle n’avait pas dit tout ce qu’elle avait à dire. Mais à ce moment-là, elle serait peut-être trop embarrassée pour admettre qu’un gentil sourire lui avait tellement fait tourner la tête qu’elle en avait oublié l’essentiel. L’un des véritables avantages de ce type de magie subtile étant que la plupart des humains ne comprenaient pas de quoi il s’agissait mais pensaient qu’ils étaient tout simplement face à un homme séduisant. Et quel médecin voudrait s’avouer qu’il pouvait se faire brouiller les neurones aussi facilement par un visage avenant ?

Une fois seuls, nous nous retournâmes tous vers Mamie. Je posai la question.

— Tu as dit que tu savais qui avait invoqué ce sortilège. Qui est-ce ?

Elle baissa les yeux, semblant quelque peu mal à l’aise.

— Ta cousine, Cair, qui vient d’temps en temps m’rendre visite. C’est ma p’tite-fille, elle aussi ! dit-elle avec une inflexion défensive sur ces derniers mots.

— Je suis au courant que tu as plus d’un petit-enfant, Mamie.

— Elle est pas aussi chère à mon cœur qu’toi, Merry.

— Je n’en suis pas jalouse, Mamie. Raconte-nous donc ce qui s’est passé.

— Elle était ben affectueuse, m’a touchée plusieurs fois, m’a caressé les ch’veux en m’disant qu’ils étaient beaux. Elle a blagué, disant qu’elle était ben heureuse d’avoir récupéré que’que chose d’joli des origines d’la famille.

Ma cousine Cair, grande et svelte, avait un physique typiquement sidhe, comme la pâleur typique de son visage lisse, qui, en revanche, était celui de Mamie, très farfadet, semblant inachevé. Des chirurgiens humains auraient pu lui greffer un nez, mais elle était comme la plupart des Sidhes ; elle ne se fiait pas trop à la science humaine.

— Savait-elle que tu allais venir me voir ?

— Oui.

— Mais pourquoi me voudrait-elle du mal ?

— Ce n’est probablement pas à toi qu’elle en veut, dit Doyle.

— Que veux-tu dire ?

— J’t’aurais pas fait d’mal exprès, mais ces deux-là… dit-elle en indiquant d’un pouce accusateur Sholto dans son dos, avant de l’orienter vers Doyle, j’les aurais occis d’bon cœur !

— En as-tu toujours l’intention ? lui demandai-je, la voix atténuée.

Elle dût y réfléchir, puis répondit finalement :

— Non, pas pour les occire. Le Roi des Sluaghs est ton homme, comme les Ténèbres ; des alliés puissants, Merry. J’voudrais pas t’priver d’une telle puissance.

— Qu’ils soient les pères de tes arrière-petits-enfants n’a donc aucune importance pour toi ? lui demandai-je en la dévisageant.

— Tout c’qui compte est qu’tu sois enceinte, me répondit-elle en souriant, le visage resplendissant de joie.

J’avais grandi en voyant ce sourire, que j’avais chéri toute mon existence.

— Et d’jumeaux, en plus, trop beau pour êt’vrai, enfin presque ! ajouta-t-elle en me l’adressant à nouveau, puis son expression s’assombrit.

— Qu’est-ce qui ne va pas, Mamie ?

— Tu portes en toi du sang de Farfadet, ma p’tite, et v’là qu’maintenant l’un d’eux est l’enfant des Sluaghs, et les Ténèbres qui peut aussi réclamer sa part dans c’mélange de gènes.

Son regard se porta au-delà d’eux sur les Volants de la Nuit toujours accrochés dans la chambre.

J’avais pigé où elle voulait en venir. Une alchimie génétique potentiellement originale était à l’œuvre en ce moment même dans mon corps. Je n’aurais pu que m’en réjouir, cependant l’inquiétude qui se lisait sur ses traits, loin d’être rassurante, n’augurait pas le réconfort qui m’était nécessaire.

Elle tressaillit, comme si elle avait soudain froid.

— J’sais plus c’qui s’passe à la Cour Dorée, mais j’sais que quelqu’un a proposé à Cair què’qu’chose qu’elle voulait tellement qu’elle a accepté d’faire ça. Elle a mis ma vie en péril en m’faisant m’énerver cont’ces deux-là ! dit-elle en les désignant à nouveau d’un pouce accusateur.

J’y réfléchis avant de réaliser que Mamie avait tout à fait raison. Ses chances de les blesser étaient élevées car ils n’auraient pas voulu amocher ma grand-mère. Cela les aurait sans doute fait hésiter, mais si elle m’avait mise en danger, ou m’avait vraiment blessée, ils n’auraient eu d’autre choix que de me défendre contre elle.

Je m’imaginai ma Mamie affrontant le Roi des Sluaghs et les Ténèbres. Cette pensée suffit à me refroidir, ce qui dut se percevoir sur mon visage, car Doyle vint se placer face à elle, près du lit. Rhys la retenait toujours légèrement en retrait, ou plutôt l’empêchait de s’approcher, et elle ne fit aucune tentative dans ce sens. Je crois qu’elle avait compris que les gardes, tous sans exception, se méfieraient d’elle pendant un certain bout de temps. Je n’aurais pu le leur reprocher, les approuvant en fait complètement. Certains sortilèges laissent des traces même après avoir été brisés. Jusqu’à ce que nous ayons analysé celui qu’avait invoqué Cair, nous ne pouvions être sûrs de l’effet qu’il était censé avoir.

— Pourquoi serait-elle prête à mettre en danger sa propre grand-mère ? s’enquit Galen, qui en semblait estomaqué.

— Je pense le savoir, dit Doyle. J’ai pénétré à la Cour Dorée camouflé en chien, où même les mastiffs noirs de meute sont traités comme de vulgaires clébards. Les gens se montrent parfois si inconsidérés.

— Tu as entendu quelque chose au sujet de ce sortilège ? lui demanda Rhys.

— Non, mais à propos de la famille de Merry, répondit Doyle en me prenant la main, ce dont je lui fus reconnaissante. Certains à la Cour font toujours référence à l’apparence physique de Cair comme raison suffisante pour ne pas accepter Merry comme Reine.

Il fit une courbette à Mamie, avant de poursuivre :

— Je ne suis pas de cet avis, mais la Cour Dorée perçoit votre autre petite-fille comme un monstre, et Merry à peine mieux en raison de son apparence humaine. Ils semblent juger aussi durement sa taille et ses rondeurs que le visage de Cair.

— Ce n’sont qu’des vaniteux, ces maudits Seelies ! vitupéra Mamie. J’ai vécu parmi eux pas mal d’années, mariée à l’un d’leurs princes, mais jamais y z’ont pu m’pardonner d’avoir l’air aussi Farfadet. J’pense qu’si j’avais eu l’air plus humain comme mon père, ils m’auraient davantage acceptée, mais l’sang d’Farfadet l’emporte sur celui humain, non, et ça y pouvaient pas voir au-d’là !

— Tes jumelles sont toutes deux jolies, et à part les cheveux et la couleur des yeux, elles pourraient passer pour des Sidhes, lui mentionna Doyle.

— Ce n’est l’cas d’aucune d’mes p’tites-filles, répliqua Mamie.

— Il est vrai, reconnut-il.

— Quelqu’un trouve-t-il intéressant que tous les pères sauf moi soient de sang mêlé ? s’enquit Rhys.

Il tenait toujours le fil scintillant loin de lui. Qu’allions-nous donc en faire ?

— Qui s’ressemble s’assemble ! déclama Mamie.

— Certains nobles Seelies ont dit que si je pouvais aider un couple de sang pur à concevoir un enfant, ils seraient bien plus nombreux à se rallier à moi que les deux Cours, dis-je, alors que d’autres affirment que seuls les sang-mêlé peuvent procréer grâce à mon pouvoir, mon sang n’étant pas assez pur.

Doyle frotta du pouce contre les jointures de ma main, un geste de nervosité révélant qu’il se posait la même question. Était-ce dû à ce que venait de dire Mamie, « Qui se ressemble s’assemble » ? N’étais-je tout simplement pas assez Sidhe pour pouvoir aider ceux de sang pur ?

— Doyle, mais tu saignes ! dit alors Galen, qui s’était approché de lui pour venir lui toucher le dos, ses doigts à présent tachés d’écarlate.

Les ténèbres dévorantes
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